Recherches généalogiques 🔎 - La lignée des Bourdin

Les souvenirs sont plus rare dans ma lignée maternelle, sans doute parce que Jeanne BOURDIN, était assez peu bavarde et Alphonsine FLEURY, ma grand-mère aux yeux bleus, encore bien moins.

Les BOURDIN avaient organisé depuis plusieurs générations des cultures maraîchères à Poitiers sur les bords du Clain. Ils y avaient ajouté un commerce d'engrais basé surtout sur le fumier de cheval que les divers régiments de la garnison leur fournissaient en abondance. Il y eut un Jean BOURDIN dit "Le Jeune" pour le distinguer de son frère aîné qui portait le même prénom. Son fils, un autre Jean, surnommé "Le Gentil", avait une soeur, Rosalie, qui épousa un certain Philippe BRESSEAU, entrepreneur de Travaux Publics.

Jean "le Gentil" eut trois enfants : une fille, Clarisse, décédée avant sa vingtième année, un fils, Clément, élève à l'Ecole Impériale Polytechnique où il est mort à vingt et un ans et un autre fils, Alfred qui fut mon grand-père.

Alfred BOURDIN avait épousé Alphonsine FLEURY et il ne vécut pas très vieux lui non plus puisqu'il est mort d'une artérite diabétique à cinquante ans. Sa fille Jeanne n'avait alors que quatorze ans à peine. Elle fut profondément affectée par cet événement inattendu et a gardé jusqu'à la fin de ses jours une véritable adoration pour son père. Adoration exaltée sans doute par le fait qu'elle avait mal supporté que sa mère se remariât deux ou trois ans plus tard avec le neveu de Philippe BRESSEAU.

Alfred BOURDIN était l'un des adjoints au Maire de Poitiers et cela valu à Jeanne, alors âgée de sept ou huit ans, l'occasion d'offrir une gerbe de fleurs au Président Sadi CARNOT lorsque celui-ci vint à Poitiers. Le grand homme l'a embrassé pour la remercier. Décidément, mes parents ont été particulièrement honorés ce jour-là ...

Ce mandat municipal permit à Alfred d'appuyer la demande du curé de Sainte Radegonde, sa paroisse, qui sollicitait un crédit pour faire réparer les chaises de l'église. Le crédit fut accordé mais le curé, au lieu de faire procéder aux réparations, préféra acheter des chaises neuves. Mon grand-père, furieux, estimant que sa bonne foi avait été trompée, décida qu'il ne mettrait plus les pieds à l'église et que sa famille irait à la messe dans la paroisse voisine. Cependant, lorsqu’Alfred fut atteint de la maladie qui ne devait pas tarder à l'emporter, son entourage se trouva consterné. Mon grand-père refusait obstinément de recevoir le curé de la paroisse. Peut-être même avait-il envisagé un enterrement civil ? Il y eut sans doute une intercession de la grande sainte Radegonde, si chère aux Poitevins, car un mouvement de mutations eut lieu dans le clergé local quelques jours avant la mort d'Alfred, si bien qu'un nouveau curé se présenta à son chevet et que tout fut enfin apaisé.

Donc, Alphonsine FLEURY se retrouva veuve à trente-six ans avec trois enfants dont l'aîné n'avait que dix-sept ans. Elle a connu des difficultés financières jusqu'à ce que survienne l'héritage de la tante BRESSEAU. Les BRESSEAU avaient eu le malheur de perdre leurs deux enfants dans des circonstances dramatiques. Leur fortune, confortable, revint ainsi moitié à ma grand-mère, moitié à Jacques DASSYS, célibataire et neveu de Philippe BRESSEAU. Le mariage, de raison ou d'inclination, des deux héritiers mit Alphonsine définitivement à l'abri du besoin et Jacques eut l'heureuse inspiration de placer toutes les liquidités du ménage dans les emprunts russes ...

Sur les photographies de la Belle Epoque, Alphonsine FLEURY se montre plutôt svelte et même assez coquette. Elle avait accompagné son mari dans de longs voyages touristiques en Suisse, en Italie ou ailleurs. Mais je n'ai connu qu'une femme à la taille épaissie qui ne sortait presque jamais de sa maison.

Foncièrement bonne, elle était capable fréquemment d'intentions ou d'actions très délicates qu'elle accomplissait avec discrétion pudique, laissant croire qu'elle était passive et indifférente à tout. Sentimentale, elle avait la larme à l'oeil à la lecture des faits divers dans le journal et elle raffolait des romans à l'eau de rose ou des mélodrames palpitants.

Étant, de loin, le plus jeune de ses petits-enfants, elle avait incontestablement une prédilection pour moi et une de ses grandes joies était de me regarder passer dans la rue lorsque je revenais du Lycée. Grâce à elle, en compagnie de mes soeurs ou de cousines, j'ai bénéficié de deux séjours d'un mois à Royan à une époque où les "bains de mer" n'étaient pas encore dévalorisés. Je lui dois mes plus beaux jouets tant que subsistait encore l'espoir de récupérer les fonds russes. Plus tard, et jusqu'à sa mort, j'ai eu droit, comme les autres, pour les étrennes à un paquet de bonbons dits "fondants" et à une orange, le tout accompagné d'une pièce d'argent.

Mon année de troisième avait été tellement brillante que j'avais été invité à subir un examen de passage pour être admis en seconde. Seulement les notes obtenues en Juin dans cet examen avaient été insuffisantes. Il m'a donc fallu, en octobre, recommencer l'épreuve et là, j'ai quand même atteint la moyenne. Rencontrant ma grand-mère, je lui ai dit que j'avais été reçu à mon examen de passage ; "ça mérite bien une récompense !" m'a-t-elle dit et elle m'a offert une pièce de dix francs. Or, en seconde, j'avais travaillé un peu plus sérieusement et ce fut avec une moyenne convenable que j'avais été admis en première sans avoir eu besoin d'examen de passage. Tout fier de moi et dans une intention qui n'était pas du tout désintéressée, je me suis donc présenté à ma grand-mère pour lui annoncer la bonne nouvelle. Mais, comme je n'avais pas passé d'examen, elle ne m'a rien donné ...

Alphonsine FLEURY était la fille d'Alphonse FLEURY et de Marentine FAIRON. Alphonse était grand et massif; les traits épais de son visage lui donnaient un air rébarbatif où se dissimulait un regard malicieux. Lorsqu'il était en chemin de fer, après avoir sollicité l'accord de ses compagnons de voyage, il se plaçait avec ostentation à la portière qu'il obstruait de sa carrure impressionnante. Il prenait alors sa mine la moins engageante et avait la satisfaction de voir les gens reculer pour chercher un autre compartiment. Après le démarrage du train, il revenait s'asseoir, tout souriant, auprès des autres qui appréciaient le fait de voyager à leur aise plutôt que d'être obligés de s'entasser à quatre ou cinq sur la même banquette.

A part cela, je ne sais pas grand chose des FLEURY. Cultivateurs ou artisans, ils habitaient Lusignan et l'un d'eux, Jean, épousa en secondes noces Marie-Catherine BOUTINEAU, la petite fille de Philippe DELAVAULT, le marchand drapier. Ce fut le grand-père d'Alphonse. Il s'était installé à Lusignan, dans la Basse Ville, dans une maison achetée jadis par Philippe DELAVAULT. Cette maison, qui existe toujours et où ma grand-mère Alphonsine est née, avait été louée avant la Révolution à la Maréchaussée; elle porte d'ailleurs une inscription datant de cette époque. Or, la Gendarmerie de la Première République prit la succession de la Maréchaussée du Roy et oublia de payer son loyer ...

Il nous est resté toute une correspondance à ce sujet et j'ignore si mes ancêtres ont été réellement dédommagés. Peut-être l'État doit-il à leurs héritiers une somme qui, avec les intérêts, pourrait régler les problèmes financiers des uns et des autres ?

Enfin, il est bon de signaler, dans cette famille, une longévité peu commune. Marie-Catherine BOUTINEAU, née en 1764, est décédée le 26 Avril 1871. Elle a donc vécu cent sept ans ; il parait que, dans les dernières années de sa vie, son entourage alertait le curé à la moindre indisposition et que, de ce fait, elle reçut une douzaine de fois l'Extrême Onction ... Son fils, qui s'appelait tout comme son père Jean FLEURY, a vécu quatre-vingt-dix-sept ans. Ce fut l'arrière grand-père de Jeanne BOURDIN, ma mère, qui elle, s'est éteinte doucement dans sa quatre-vingt-dix-huitième année.

Je n'avais que trois ans lorsque Marentine FAIRON, épouse d'Alphonse FLEURY, et donc mon arrière-grand-mère, est décédée mais j'en garde toutefois une image qui n'est pas trop floue. Elle était assise dans la salle à manger de sa fille Alphonsine, près de la fenêtre de droite ; je précise cette localisation qui m'a été confirmée par la suite. C'était une femme petite, vêtue de noir et portant la coiffe poitevine. Elle avait sur ses genoux des cartons de jeu de loto qui m'intéressaient beaucoup et on me recommandait de ne pas trop m'agiter pour ne pas lui marcher sur les pieds.

Le frère de Marentine, Auguste, ancien militaire, a laissé la réputation d'un homme qui ronchonnait sans arrêt. Il était garde-champêtre à Béruges où son épouse exerçait la profession de sage-femme. J'ai hérité du sabre du garde-champêtre et de quelques livres d'accouchement du siècle passé.

Pas d'autres souvenirs précis de la lignée FAIRON et pourtant quelques actes notariés permettent de remonter la filière jusqu'à ce GAUDIN, maître cordonnier à Sanxay en 1637. Par ailleurs les FAIRON ont été très prolifiques et se sont éparpillés. J'ai pu cependant, grâce à un heureux hasard, faire la connaissance récemment d'un cousin éloigné portant ce nom. Passionné de généalogie, il m'a montré tout un éventail d'une centaine de parents insoupçonnés.


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Mercredi 24 avril 2024