Katryne 🦉 - Une orientale en Provence


Non loin des artifices de la côte varoise,
Notre–Dame de Pépiole s’offre à nous,
chaleureuse et discrète,
cachée dans son écrin de verdure provençale.

Pépiole se mérite et l’aventureux est récompensé. A Six-Fours, il faut déjà s’éloigner des beaux quartiers du bord de mer. Au delà de la zone industrielle, après les nomades et les carcasses de voitures, un étroit chemin ombragé s’enfonce vers la forêt. Et là, soudain, la chapelle de Pépiole surgit dans son écrin de campagne provençale. Le mistral fait chanter la sombre verdure des pins, frémir l’argent des oliviers, courber le bleu des cyprès. Pépiole nous attend tout au bout du sentier, toute en rondeurs et en rousseurs : rondes les trois absides, rondes les pierres douces des murs, ronde la marche devant la porte au Sud, chauffée par le soleil.

Notre-Dame de Pépiole n’était plus ouverte au culte depuis la Révolution quand en 1956 un bénédictin la découvre, abandonnée, banale construction couverte de ciment gris.

Dom Charlier donnera vingt années de sa vie pour que la chapelle retrouve son l’éclat d’autrefois : il va gommer les crépis rajoutés de plâtre et de ciment, retrouver les ouvertures murées, reposer les autels de pierre, remonter les restanques, replanter les oliviers.
 
Pépiole par Yves Quenec'hdu
Pépiole par Yves Quenec'hdu

 

Les vitraux de Dom Charlier

Les vitraux constituent la touche la plus personnelle dont il ait laissé la marque. Le promeneur explore les abords avant de pénétrer dans la chapelle. Il découvre, ô stupeur ! que des meurtrières menacent l’intrus de leurs tessons de bouteilles. Interloqué, il s’approche, vérifie, examine. Non, c’est authentique : ce bijou d’architecture religieuse préromane est hérissé de débris de verre.

Il quitte alors le soleil éclatant du parvis et s’enfonce sous le porche dans la pénombre de la chapelle. Et là, miracle ! Les tessons agressifs se sont transformés en vitraux lumineux. Les orange, les jaunes, les verts et les bleus s’ordonnent en tableaux, dont la symbolique biblique nécessite parfois les éclaircissements du Père Hubert, gardien du culte : le Christ en gloire, le buisson ardent, l’échelle de Jacob… Il va conter aussi la vieille histoire de Pépiole.

On la dit plus ancienne chapelle chrétienne d’Europe, mais ceux qui l’ont élevée, aux temps carolingiens, avaient choisi le site d’un haut lieu du paganisme. Et l’accueil du porche laisse naître un malaise vague, quand les yeux avertis y repèrent, étonnés, entre les dalles, la pierre sacrificielle des temps immémoriaux.

En 1956, les chercheurs ont étudié cette roche haute de quatre mètres, dont seule la face supérieure affleure aujourd’hui à l’entrée de la chapelle. Des coupelles creusées paraissent sur le haut de la pierre. Le liquide qu’on y verse ressurgit, dit-on, plus bas sur la face verticale exposée vers le Sud.

L’édifice recèle d’autres mystères et son architecture a intrigué plus d’un. La plus probable des hypothèses, bien que non vérifiée, fait état d’une inspiration orientale.

 

Une architecture orientale

Les travaux archéologiques de 1956 ont révélé que les nefs latérales n’avaient sans doute pas leur abside lors de la construction primitive au Vème siècle. La nef centrale aurait été parée de deux pièces rectangulaires, à droite le secretarium ou sacristie, à gauche le martyrium, sur le modèle des toutes premières églises syriennes et chypriotes.

Dans un martyrium s’exposent les reliques des martyrs. Les édifices religieux paléochrétiens étaient tous fondés en souvenir de martyrs. Aucun martyr n’est associé à Pépiole, mais sa construction semble dater des débuts du culte de la Vierge.

 

Cassien et Pépiole

Dès l’origine, Notre-Dame de Pépiole dépend de l’abbaye de Saint-Victor de Marseille. L’abbaye a été fondée vers 416 par Saint Jean Cassien. Or, Cassien a beaucoup voyagé en Orient : Bethléem, Constantinople, Alexandrie. De ses séjours dans les monastères égyptiens du désert, il a rapporté les principes des institutions monacales. C’est lui l’inspirateur de la liturgie gallicane, d’origine orientale qui s’opposait à la romaine. Si l’on y ajoute que le concile d’Ephèse en 430 se détermine sur la nature de la Vierge et initie le culte de Marie, on rejoint l’affirmation de grands voyageurs : Notre-Dame de Pépiole est la réplique de la chapelle de la Vierge d’Ephèse, ville où Marie est née et aurait fini ses jours.

Le Père Charlier essayait d’en déduire que Cassien avait aussi rapporté d’Orient un modèle architectural et l’invention du culte marial en Occident : Pépiole y serait la première église dédiée à la Vierge. Rien ne le prouve, mais les indices concordent. Et d’autres l’ont pensé, tel cet artiste contemporain quand il offre à la chapelle trois icônes, qu’il a peintes sur bois sur le mode oriental, dorées et rutilantes. Et l’histoire est si belle que le mistral a soufflé toute prudence scientifique : nous voulons tant y croire à notre Pépiole, notre orientale de Provence.

 


Le retour de la statue
Le Père Charlier rénovait Pépiole depuis deux ans, quand se présente à lui une famille vivant au pied de la colline. Ils portent une statue de la Vierge Marie, une statue en bois de sorbier où l’on devine des traces de brûlure et de peinture ancienne. Ils se disent les gardiens de la statue de Notre-Dame de Pépiole. Leur ancêtre l’a sauvée des flammes de la Révolution. La mission s’est transmise de génération en génération : quand Pépiole revivra et que Dieu de nouveau y demeurera, Notre-Dame retrouvera sa place dans la chapelle.

 


Pour aller plus loin

 

Quelques photos par Maud (septembre 2013)

 

Le porche de Pépiole

Les absides de Pépioles

 

 

un  vitrail


Intérieur Pépiole

Vitrail en tessons de bouteille Vierge de Pépiole

 

 

Document 1 : Notre-Dame de Pépiole selon le site du Diocèse de Toulon-Fréjus


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La chapelle Notre-Dame de Pépiole pré-romane est un des plus vieux monuments paléochrétiens de France. Les premiers moines venus de l’abbaye de Saint-Victor à Marseille, se sont installés sur le site dès le VIème siècle.
L’édifice religieux a été étendu au VIIIème puis au XIIème siècle.
Découverte en 1956 par le père Paul-Célestin Charlier, moine de l’abbaye bénédictine de Maredsous, la chapelle a été restaurée pour être rendue au culte et devenir d’autre part un lieu d’accueil fraternel pour des personnes voulant prendre un temps de ressourcement.
Le père Paul-Célestin a été secondé par plusieurs personnes dont le père Hubert, et tous ceux que la cloche appelait pour la liturgie dominicale afin d’assurer la continuité de l’histoire spirituelle de Pépiole.
En 1989, Mgr Madec a érigé ce lieu en association privée de fidèles.

La particularité architecturale de la chapelle réside dans la juxtaposition de trois nefs disposant chacune d’une abside. En outre les vitraux présentent une originalité certaine puisqu’ils sont réalisés avec des fonds de bouteilles de toutes les couleurs, l’heureux effet de la lumière du soleil donnant à chaque vitrail un sens biblique propre.
Derrière l’autel Nord, la statue souriante de Notre-Dame de Pépiole, vénérée depuis le XVIème, réalisée en bois doré de sorbier, porte les stigmates de la Révolution.
La chapelle est inscrite à l’inventaire des Monuments historiques depuis 1967.


Ouvert tous les jours de l’année
- 15h à 18h. (accueil gratuit – dons acceptés)
Offices
- Semaine : Vêpres suivies de la messe, du lundi au vendredi à 18h (heure d’hiver) – 18h30 (heure d’été).
- Dimanche : 9h30.
Pour un accueil en retraite ou un accompagnement personnel, prendre contact avec le père Hubert de Bonhome ou Jacqueline, consacrée en 1987, chargée de l’accueil.

 

 

Document 2 : Guide de la Provence Mystérieuse, par Jean-Paul Clébert, Éditions Tchou, Paris, 1998 (Citant Louis Henseling : Zigzags dans le Var, Toulon 1934-38)

 

La reine des Épingles.

Au Nord de Six-Fours, dominant le cours de la Reppe qui coule vers Sanary, se dresse le sanctuaire de Notre-Dame de-Pépiole. C'est l'une des plus anciennes chapelles de Provence. En 1298, déjà, elle dépendait de la cathédrale de Toulon. "Selon la tradition, plusieurs fois séculaire, le jour de la fête de Notre-Dame-de-Pépiole, sitôt la messe dite, les jeunes gens fauchaient l'herbe du terre-plein avoisinant le sanctuaire, emplacement habituel du bal, et les danses s'organisaient au son du tambourin. Chaque danseur, en priant une jeune fille de danser, lui remettait une épingle qu'elle fixait à son corsage. Et celle qui, le bal fini, possédait le plus grand nombre d'épingles était promue reine du bal.". Cette fête a lieu le 8 septembre.

 

Document 3 : Notre-Dame-de-Pépiole par François Jouglas 1963


Cette Chapelle s'élève, parmi les pins et les oliviers, sur une éminence dominant la Reppe, au sud de la gare d'Ollioules-Sanary. On y accède par un chemin se détachant de la grande route : Toulon-Les Playes-Sanary.
Elle comprend trois nefs juxtaposées orientées est-ouest. La date de fondation de la chapelle « Santa Domna Maria de Piopelos » ne nous est pas connue ; le premier document où il en est fait mention date de 1268, dans un état des bénéfices du chapitre de la cathédrale de TOULON, auquel cette chapelle appartenait alors.
La nef la plus au sud a 4 m 80 de long, 2 m 40 de large et 3 m 80 de hauteur. Contre sa face nord, séparée d'elle par une arcade, existe une deuxième nef de 6 m 80 de long, 2 m 52 de large et 3 m 80 de hauteur. C'est dans cette nef que l'on accède actuellement et dans laquelle se trouve un autel primitif : une table de pierre reposant sur un bloc de maçonnerie. Ces deux chapelles, actuellement voûtées, ont dû, à l'origine, être recouvertes d'une charpente. Elles sont éclairées par deux rangées de petites ouvertures aménagées dans l'épaisseur du mur. L'ensemble doit remonter au VI° siècle. La voûte de l'abside de la première nef est très curieuse par son mode de construction.


Plus tard, la chapelle fut agrandie par la construction d'une troisième nef plus au nord, plus large et plus haute. L'épaisseur des murs, les rares ouvertures et leur étroitesse, les trois autels primitifs constituent un ensemble certainement très ancien, ressemblant aux vieilles chapelles syriennes, mais sans doute restauré vers le XI° siècle, où les chapelles reçurent les voûtes en pierre.
Des ruines d'un prieuré sont visibles contre la chapelle, sur sa face nord, et un local appartenant à ce prieuré a été aménagé en prolongement de la chapelle centrale vers l'ouest.


A la Révolution, la chapelle fut vendue comme biens nationaux. Elle figure sur le procès-verbal du 3 février 1791 de la Viguerie de Toulon, donnant la liste d'encadastrement des biens ci-devant privilégiés, sous le nom de « Hermitage et chapelle de Notre-Dame des Neges, quartier de Pépiole ».
Elle fut acquise par un nommé Louis BOURAILLON, qui la revendit, le 30 Thermidor an XII (18 août 1804), aux frères JOURDAN, d'Ollioules. Ceux-ci la cédèrent, le 1° septembre 1806, à la paroisse de SIX-FOURS pour l'exercice du culte. L'abside de la chapelle nord contient une belle statue en bois de la Vierge, du XVI° siècle, qui fut sauvée des destructions de la Révolution.
Chaque année, le 8 septembre, anniversaire de la Nativité, est fêté à N.-D. de Pépiole.
Jadis, les fêtes duraient plusieurs jours; on dansait au tambourin sur la petite esplanade qui s'étend à côté de la chapelle. Des baraques foraines s'installaient à proximité, et on y vendait, entre autre, du nougat.


Aujourd'hui, grâce aux Pères Bénédictins, la chapelle a été restaurée, les murs grattés des divers enduits qui les avaient recouverts pendant des siècles. Les ouvertures qui avaient été murées, ré-ouvertes. Les autels des deux chapelles extrêmes, qui ont été retrouvés, ont été réinstallés dans leur forme ancienne. Il s'agit d'un travail considérable, qui a redonné à ce lieu saint, un des plus anciens de Provence, son bel aspect primitif).

Plan de Pépiole selon François Jouglas

 




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