Évangeline Soyer 🌏 - Courte autobiographie

On m'a souvent demandé d'écrire une courte description de ma vie et je vais donc dédier celle-ci à ma sœur Adrienne.

Je suis née à Toronto, Canada, de parents français. Mon enfance s'écoula au Canada, où je suis allée en classe, mais pas en France.

Mon grand-père maternel, Auguste (Augustin) Lucas, époux de Zoé Gallais, se maria à Rochefort, en France, en 1830. Il était capitaine de navire armé par l'État et la plupart du temps fut employé à la mer, voyageant autour du monde. Son premier enfant, Mathilde, cependant naquit à Rochefort. Quand le baby eut environ 6 mois, elle fut laissée à ses grands-parents Gallais en France et pendant 2 ans, pas un mot ne fut reçu des parents.

A son retour, le grand-père Lucas raconte sa dure expérience à la mer. En doublant le Cap Horn,
une violente tempête d'hiver les surprit. Pendant 40 jours, ils furent avec le résultat que le "Trophée Mathilde", eut le grand mat cassé et perdit son gouvernail !!! Le navire entier fut couvert de glace, avec seulement 2 heures de jour, par moments, il y avait peu de temps pour la fonte de la glace. L'eau douce commença à manquer. 4 nœuds en 24 heures fut tout ce que le Trophée Mathilde put réaliser. Finalement, en arrivant à Valparaiso, au Chili, ma grand-mère mit au monde Dolorès Lucas, ma mère. C'était le 17 mars 1835, pendant que le navire était en réparation. Un mois s'écoula, puis le navire put faire route vers la France. le voyage dura 5 mois.

Grand-père retourna alors à la mer, laissant sa femme et ses deux enfants à Rochefort. A son retour, il abandonna son commandement, mais son amour de la mer le reprit.

Le nouveau voyage, avec sa famille, le conduisit à Papeete (Tahiti). Ils y séjournèrent 8 ans, fondant un "Dry goods store", genre d'épicerie. Le commerce était bon avec les Hindous, ils mentionnent à tort les Indiens. On échangeait quelquefois de l'or et quelquefois de rares et superbes formeas (coquilles d'huitres perlières) qui étaient pêchées dans la rade et procuraient un moyen d'échange. on les trouvait en plongeant dans la rade. Grand-mère avait collectionné assez de celles-ci pour les vendre à un musée de Paris, mais ils ne parvinrent jamais à destination. Le capitaine du navire ne voulut jamais les vendre. Aucune raison n'est donnée, sans doute ne voulut-on pas payer le transport, si bien que finalement, elles furent jetées à la mer.

Ces Hindous du sud de l'Amérique étaient de braves gens, mais étaient paresseux, comme ils n'avaient pas grand travail pour se procurer de la nourriture. Elle se composait de porc (?), de bananes, de pain, de fruits et des ignames. Ces dernières étaient mangées avant maturité et mises au four. Des pierres rondes et plates étaient chauffées. Des feuilles de palmier étaient ensuite posées sur lesquelles ils mettaient leurs victuailles. celles-ci étaient une fois de plus couvertes de feuilles de palmier, sur lesquelles étaient déposés les détritus, déchets ... Les Hindous s'asseyaient autour jusqu'au coucher du soleil avant de manger. (Ils buvaient) du lait de coco dont les coques servaient de récipient.

Ma grand-mère ne pouvait s'occuper des travaux du ménage et dirigeait le commerce. Elle employait des Hindous pour faire les travaux domestiques. Comme salaire, on leur cédait du savon parfumé, qu'ils appréciaient grandement. Une nuit, son magasin fut pillé. les marchandises manquantes étaient justement les savons et les parfums. Ceci fut rapporté à leur reine qui à son tour découvrit les coupables. Elle leur ordonna d'aller dans les montagnes et d'amener suffisamment de bestiaux pour payer le dommage. Ce fut à l'église que peu de temps après Grand-mère vit la reine avec son mari, suivi par ses sujets en file indienne, suivant leurs rangs, venant en procession solennelle pour offrir la paix.

En 1848; Grand-mère et sa famille retourna en France. Ils y restèrent une année.

En 1849, ils vinrent en Amérique du Nord, s'établissant dans le comté de Preston, Virginie de l'Ouest. Après deux ans, ils se fixèrent à Cincinnati. C'est ici que ma mère rencontra mon père, Alfred Soyer. Il naquit le 18 octobre 1828, dans la ville de Reims. Il y a là une erreur, probablement, car on a ajouté Compiègne, qui est en Picardie. Ayant quitté l'école à 12 ans, il partit à Paris où il apprit son métier de confiseur, avant de devenir marchand de sucre candi. Il fut appelé au service militaire, mais ayant tiré un bon numéro, fut exempté du service. Il partit pour les États-Unis rejoindre son père qui y était depuis plusieurs mois. Mon père travaille de son métier à Washington, Philadelphie, Boston et Charleston. Il envisageait de retourner en France, mais ayant été avisé de la mort de sa mère, il partit pour Londres, y travaillant de son métier pendant deux ans.

Les Amériques le rappelèrent et il retourna aux États-Unis pour s'établir à Cincinnati.

Le 6 juillet 1858, mon père et ma mère se marièrent. 4 enfants naquirent : un fils, Ollivier, mourut enfant, Ma soeur Adrienne qui mourut le 23 novembre 1879 à l'âge de 20 ans. Moi même Évangeline, en 1863. une autre sœur Marie en 1868, encore vivante en 1941.

Au moment de la guerre civile, la famille émigra et s'établit au Canada, à Toronto, où les deux derniers enfants naquirent. Mon père monta un magasin de confiserie et c'est ici que mourut ma mère. La santé de mon père fléchit et sur conseil de son médecin, il dut changer d'air. Il vendit son affaire et nous retournâmes en France.

Nous établîmes dans une école, près de Brest, en France. En 1871, mon père acheta une propriété qui avait été un couvent catholique. bien que vaste et charmant, des bruits étranges dans la nuit rendirent ce séjour désagréable et mon père pria mon oncle de revendre cette propriété et nous retournâmes aux États-Unis, à Parkesburg, en Virginie de l'Ouest. En 1875, il y a acheté une ferme de 44 acres.

En 1877, mon père épousa la sœur de ma mère, Mathilde, qui mourut en 1923 à l'âge de 92 ans. Mon père mourut en 1928 à l'âge de 100 ans, 1 mois et 3 jours. En 1925, nous vendirent une partie de la ferme et construisîmes une maison en briques où nous nous établires le 20 septembre 1926.

Parmi mes propriétés de famille, il y avait une boite à coudre, donnée à ma mère Dolorès Lucas, par son parrain quand elle eût 4 ans. elle est en assez bonne condition et a plus de 100 ans.


NDLR : Au moment où Évangeline Soyer écrit ces lignes, en 1941, elle a 78 ans et habite sans doute Parkesburg.



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